Alix Grousset

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Confessions confinées

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21 avril 2020, la France est confinée depuis 5 bonnes semaines.

Mettre des mots sur des maux, voilà un exercice que j’ai plaisir à exécuter. L’écrit se prête plus facilement à ce jeu d’équilibre, tant la parole peut être interprétée. Les écrits aussi, certes, mais le recul nécessaire à la publication d’un article évite certains écueils.

Je ne m’étale pas trop sur les réseaux au sujet de la crise sanitaire que nous traversons. Plusieurs raisons expliquent cela:

  1. À quoi bon rajouter une pierre de plus à l’édifice du climat anxiogène déjà très présent sur les réseaux.
  2. L’angoisse de la bêtise. Un mot plus haut que l’autre, une phrase prise à contre sens et nous voilà dans la tourmente.
  3. Le ressenti personnel, dont la définition consiste à rester privé.

Sur le blog, je me sens moins oppressée, plus libre peut être. Alors, la dimension privée s’efface peu à peu dans l’espoir que mon sentiment puisse apaiser certaines consciences ou être partagé par d’autres.

C’est curieux cette privation de liberté. Elle n’est pas prévue pour nous punir, mais pour nous protéger. Alors que nous sommes des milliers à se rêver une vie confinée avec Netflix et des céréales en temps normal, la perspective de la réalité de la situation nous pousse à y préférer les sorties risquées. À tel point que la sortie courses hebdomadaire devient un événement attendu comme le 25 décembre. Et puis la réalité te rattrape. La queue de longues minutes devant les magasins, l’attestation à ne pas oublier, les rayons vides, les masques, le silence.

Les larmes montent.

confessions confinées

La peur de l’inconnu et le chamboulement des habitudes sont quelque chose qui m’angoissent énormément. Chaque moment de ma vie est cadré. Millimétré, répété avec précaution et rien n’est laissé au hasard. On parle d’ “hyper contrôle”. Comme tout excès, il n’est pas foncièrement bénéfique. L’hyper contrôle rassure, donne un sentiment de surpuissance si, et seulement si, tout se passe comme prévu. Un souffle est le château de cartes s’effondre. Le mien est par terre.

L’impossibilité de se projeter est peut être ce qui m’angoisse le plus aujourd’hui. Les plans sur la commette, les nouvelles aspirations et envies sont un moyen d’occuper le vide. On en a déjà parlé de ce vide. S’il n y a pas de projet? Alors le petit vélo pédale, pédale et pédale encore dans la tête pour combler le vide.

Mon manque à moi, ce n’est pas le manque physique. J’entends par là, le manque de mouvements. C’est bien le manque de projections, qui, couplé à l’incertitude, crée un trou noir d’angoisses.

Les personnalités se dessinent, la méchanceté se reforme chez certains, la bienveillance en illumine d’autres. Scandale au rayon clémentines quand une femme s’approche par mégarde un peu trop près d’une seconde. La rage s’empare d’elle, la transforme. “Nous sommes en guerre” a dit monsieur Macron, un vieux souvenir des documentaires sur le rationnement en 39-45 refait surface. En ces temps de crise l’invidualité prime souvent à tort sur le collectif.

D’ailleurs, restons en 39-45. Un parallèle historique m’a fait prendre conscience de notre rôle à jouer dans la situation actuelle:

Nos grand parents devaient aller au front pour se battre contre un ennemi visible. Quand à nous, nous devons rester chez nous pour combattre un mal invisible. Drôle de période. Quitte à choisir, il est évident que la seconde solution est la plus aisée à réaliser.

Et puis, cela permet également de relativiser sur ces consignes provisoires qui sauvent pourtant des vies.

Le jogging attendra.

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